C’est avec un profond sentiment d’injustice et de colère que l’APSOHA (Association pour la promotion de la science ouverte en Haïti et en Afrique francophone), dont la mission est, entre autres, l’empowerment des étudiants et étudiantes d’Afrique francophone, a pris connaissance de la répression policière dont ont été victimes plusieurs étudiants et étudiantes en sciences sociales du Niger le 10 avril dernier, notamment un étudiant de sociologie, Malah Bagalé, décédé. Nous avons appris qu’au moins un membre de l’APSOHA, M. Oumarou Hamadou Soumana, étudiant de maîtrise en géographie, a été arrêté par la police, puis heureusement relâché au bout de 5 jours.
Le comité fondateur de l’APSOHA a donc décidé d’envoyer immédiatement 133 000 CFA à l’Union des étudiants nigériens de l’Université de Niamey (UENUN) pour prendre soin des blessés et des personnes arrêtées. Il s’engage aussi à procéder à une collecte de fonds au bénéfice des étudiants et étudiantes victimes de la répression – d’où la présente page.
Cette collecte se fera par le biais de l’Association science et bien commun (organisme parent de la jeune APSOHA) qui peut recueillir des fonds par paypal (voir le bouton ci-dessous) ou par virement bancaire (voir les détails plus loin). Les fonds recueillis seront acheminés directement par moneygram au secrétaire général de l’UENUN, sous la supervision des étudiants et étudiantes nigériens membres de SOHA qui nous tiennent informés des développements et qui vont aller visiter les blessés pour ramener plus d’information sur leurs besoins. Ces fonds serviront à aider les étudiants blessés ou arrêtés à payer leurs frais médicaux ou juridiques.
Le comité fondateur de l’APSOHA s’engage aussi à procéder à un travail de sensibilisation à ces événements dans les pays du Nord.
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Voici un texte envoyé par l’étudiant en master de sociologie de l’éducation Hamissou Rhissa Achaffert, assistant du projet SOHA, illustré par des photos partagées sur le groupe WhatsApp SOHA au Niger. Hamissou a rendu visite aux étudiants arrêtés et aux étudiants blessés.
Le 10 avril 2017, l’appel à manifestation de l’Union des scolaires nigériens (USN) a immédiatement déclenché la réaction violente de l’État à travers le déploiement des forces de l’ordre jusqu’à l’enceinte de l’espace universitaire. Pendant cette répression, plusieurs étudiant-e-s de l’Université Abdou Moumouni (UAM) de Niamey ont été horriblement molestés. Plusieurs étudiant-e-s souffrant de problèmes respiratoires sont tombés le 10 Avril 2017 à cause du gaz lacrymogène qui a été utilisé pour disperser et faire sortir les étudiant-e-s du campus universitaire. Ces étudiants réclamaient seulement de meilleures conditions de vie et d’études. Malheureusement, à la suite des affrontements violents, plusieurs des blessé-e-s sont dans un état de santé grave et au moins un étudiant a rendu l’âme hier aux environs de 16 h 30. Il était en dernière année de licence au Département de sociologie et d’anthropologie de l’UAM.
Les blessé-e-s ont été transféré-e-s au centre hospitalier universitaire où ils ont reçu les premiers soins. Selon le secrétaire général de l’Union des étudiants nigériens à l’université de Niamey (UENUN) interviewé par RFI, au moins 29 personnes ont été victimes de l’horrible violence des forces de l’ordre composées de la gendarmerie nationale, de la police nationale et de la garde nationale. D’autres furent matraqué-e-s et déporté-e-s dans les centres de détentions dans des conditions inhumaines. À cela s’ajoute la fermeture du campus universitaire dans la soirée par le ministre de l’enseignement supérieur, ce qui a obligé les étudiant-e-s qui résident sur le campus (soit à peu près 23000) à déserter les lieux, pour certains sans savoir où aller .
Cette situation intervient à un moment très crucial pour les étudiant-e-s qui sont sortis dans la rue pour réclamer la justice et de meilleures conditions de vie et d’étude. Ils et elles souhaitent notamment plus de régularité dans le paiement de l’aide sociale et de la bourse semestrielle, le rejet de l’adoption en septembre dernier de mesures restrictives. Ils se plaignent des semestres qui durent des années dans certaines facultés, des infrastructures insuffisantes ou inexistantes (logement, salles de cours, absence d’une couverture Wi-Fi dans les facultés etc.) et du manque de personnel et d’agents techniques.
Le mouvement d’hier a été l’occasion pour les forces de l’ordre d’entrer dans les bâtiments et de s’emparer des propriétés des étudiants et ou de les détruire (motos, ordinateurs portables, téléphones portables, photocopieuses, imprimantes, réfrigérateurs etc.). Ils sont allés jusqu’à saccager la porte et les ordinateurs de la bibliothèque de la Faculté des lettres et sciences humaines (FLSH), ce qui montre que les étudiant-e-s ont été poursuivi-e-s par les forces de l’ordre jusqu’à leurs clubs dans les facultés où ils ont été matraqués et mis sous embargo : pas de nourriture, pas d’accès aux chambres jusqu’à la tombée du jour. Cela a aggravé l’état de santé de nos camarades qui sont dans une situation grave au CHU .
Ces violents mouvements interviennent au moment où la situation sociale du pays est très critique, caractérisée par des grèves répétées des enseignants du secondaire et du primaire. Pendant ce temps, certains membres du gouvernement sont accusés par la société civile du détournement d’une énorme somme de 200 milliards de francs CFA dans une scabreuse affaire de vente illicite d’uranium que les médias dénomment UraniumGATE.
C’est dans cette situation que nous, étudiants et étudiantes du Niger, demandons votre soutien pour contribuer à la prise en charge sanitaire des blessés et pour venir en solidarité aux familles des victimes de cette répression étatique.
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VIREMENT BANCAIRE : Caisse centrale Desjardins, CCDQCAMM, Institution 815 Transit 20186 compte 1109198 (Association science et bien commun)
En Afrique, vous pouvez envoyer vos dons directement à Hamissou Rhissa Achaffert par Orange money ou Al Izza à +227 90311116.
La liste des donateurs et des dons s’affichera en bas de cette page et sera mise à jour régulièrement.
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Pour en savoir plus :
- http://www.jeuneafrique.com/429008/politique/niger-mort-centaine-de-blesses-plus-de-300-interpellations-lors-manifestations-etudiantes/
- http://www.rfi.fr/afrique/20170411-niger-mort-heurts-entre-etudiants-policiers-lundi
- http://www.tamtaminfo.com/evenements-tragiques-du-10-avril-alternative-espaces-citoyens-prend-position/
- http://www.lemonde.fr/afrique/article/2017/04/17/aimer-rousseau-et-sankara-puis-mourir-sous-les-coups-de-la-police-a-l-universite-de-niamey_5112546_3212.html
- http://www.universityworldnews.com/article.php?story=20170413070911654
DÉCLARATION DE PRESSE DU COLLECTIF DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE NIGERIENNE
Réuni à l’effet d’examiner les derniers développements de la situation scolaire et universitaire au Niger, au lendemain des manifestations des élèves et étudiants à Niamey et à l’intérieur du pays, le collectif des organisations de la société civile, fait la déclaration dont la teneur suit :
A peine deux (2) jours après l’interpellation du gouvernement par les députés nationaux au sujet de la situation particulièrement grave que traverse l’école publique nigérienne, les manifestations des élèves et étudiants, tant à Niamey qu’à l’intérieur du pays, sont venues montrer aux yeux du monde entier que les autorités en place n’ont finalement aucune réponse concrète aux légitimes revendications des acteurs du secteur de l’éducation en dehors des discours creux et de la répression policière.
En effet, alors que les manifestations des élèves et étudiants étaient tout à fait prévisibles depuis l’ultimatum lancé par le Comité directeur de l’Union des Scolaires Nigériens (USN), les autorités en place, convaincues que les forces de l’ordre se feraient le devoir de contrecarrer toute action de protestation dans les rues, n’ont engagé aucun dialogue avec les responsables de cette organisation ; préférant ainsi laisser les élèves et étudiants sortir dans les rues de Niamey et des villes de l’intérieur du pays se mesurer à des éléments des forces de l’ordre équipés de tous le matériel nécessaire à la répression et visiblement très déterminés à en découdre avec les jeunes frères et sœurs.
Aussi, profondément attaché au respect des droits humains et des valeurs de la démocratie, totalement résolu à empêcher par tous les moyens légaux le retour à l’autoritarisme d’antan, convaincu de la nécessité d’une large mobilisation citoyenne non partisane pour la réhabilitation de l’école publique et la défense des acquis des luttes antérieures, indéfectiblement attaché à la sacralité de la vie humaine, le collectif des organisations de la société civile :
1-Condamne avec la dernière énergie l’usage disproportionné de la force contre les manifestations scolaires et estudiantines du 10 avril 2017, dont le bilan officiel dressé par les autorités fait cas d’un étudiant tué, de 88 blessés et 313 interpellés ;
2-Présente ses condoléances les plus attristées, sa compassion et sa solidarité aux familles et aux proches des victimes de cette répression barbare d’un autre âge, souhaitant bon rétablissement aux blessés ;
3-Dénonce vigoureusement l’hostilité manifeste des autorités en place à l’exercice légitime et légal de la liberté de manifestation consacrée par les instruments juridiques internationaux et la Constitution du 25 novembre 2010, ainsi que leur propension maladive à user de la force brute contre les manifestants non armés ;
4-Réaffirme devant l’opinion nationale et internationale sa détermination à s’élever contre l’usage disproportionné de la force dont est devenu coutumier le régime en place à Niamey, et qui a entrainé plusieurs fois, depuis 2011, mort d’hommes et atteintes à l’intégrité physique des manifestants ;
5-Exprime sa profonde indignation devant les discours méprisants et mensongers débités par des autorités gouvernementales qui cherchent par tous les moyens à s’exonérer de toute responsabilité par rapport au drame survenu sur le campus universitaire de Niamey, et plus généralement par rapport à l’état de déliquescence du système éducatif nigérien ;
6-Rappelle aux éléments des forces de l’ordre qu’il est dans leur intérêt, chaque fois qu’ils sont envoyés sur le terrain pour réprimer des manifestants pacifiques, de garder à l’esprit qu’ils sont au service des citoyens et non d’un quelconque gouvernement, et que leurs responsabilités individuelles et collectives restent engagées en cas d’atteintes à la vie et à l’intégrité physique des manifestants ;
7-Exige des plus hautes autorités le limogeage de tous les responsables des forces de l’ordre engagés dans la répression des manifestations du 10 avril, des responsables ministériels et universitaires qui ont autorisé la violation des franchises universitaires, et l’ouverture d’une enquête visant à établir les responsabilités individuelles des agents qui ont exercé des brutalités contre les manifestants ;
8-Dénonce les violences exercées par les forces de l’ordre à l’endroit des journalistes et les exhorte à continuer à accomplir avec courage et détermination leur mission d’information du public ;
9-Exige la libération immédiate et sans conditions de toutes les personnes arrêtées dans le cadre des manifestations du 10 avril 2017 et la réouverture de tous les campus universitaires fermés, et apporte tout son soutien aux élèves et étudiants, ainsi qu’aux enseignants, qui luttent courageusement pour l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail, ainsi que pour la réhabilitation de l’école publique nigérienne aujourd’hui en totale déliquescence ;
10-Invite l’ensemble des forces vives de la Nation, indépendamment de toutes considérations partisanes ou autres, à se joindre au collectif des organisations de la société civile en vue de faire, le mercredi 19 avril 2017à partir de 15h, une grande marche citoyenne, à l’échelle nationale, pour défendre le droit à l’éducation de nos enfants, dénoncer la répression sauvage des manifestants pacifiques, réclamer justice pour les victimes, et s’élever contre l’impunité pour tous ceux qui se croient en droit de lancer des hordes policières contre des enfants désarmés.
Enfin, le collectif des organisations de la société civile invite, d’ores et déjà, tous les Imams et leaders musulmans à profiter de l’occasion de la prière hebdomadaire de vendredi pour faire, dans toutes les mosquées du Niger, des invocations et des prières pour le repos des âmes des victimes de la barbarie policière, mais aussi pour le succès de la mobilisation citoyenne du mercredi 19 avril 2017.
Fait à Niamey, le 12 Avril 2017
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DONATEURS
Comité de l’APSOHA : 300 $ CAD (133000CFA) 11 avril 2017